Esther de Racine : Résumé
Le sujet d’Esther est la délivrance des juifs qui étaient restés à Babylone après la captivité. Aman, le ministre du roi Assuérus, a menacé de les détruire parce que l’un d’eux, Mardochée, a refusé d’incliner son front devant lui. Punir ce misérable ne suffit pas à sa vengeance ; il faut qu’elle s’étende sur toute son odieuse nation. Il obtient facilement du roi un édit qui voue à la mort les juifs dispersés dans tout l’empire. Mais Mardochée veille sur ses compatriotes. Esther, l’épouse d’Assuérus, est sa nièce ; c’est lui qui t’a élevée, c’est à elle qu’il s’adressera pour qu’elle obtienne du roi la grâce de sa nation. Il compte d’autant plus sur la bienveillance d’Assuérus qu’il a sauvé celui-ci d’un complot tramé contre sa vie. La Providence semble seconder les plans de Mardochée. Le roi, tourmenté par un songe, s’est fait lire les annales de son règne qui lui ont remis en mémoire les services de Mardochée et, comme il a oublié de le récompenser, il ordonne à Aman de le conduire en triomphe dans la ville. Aman n’obéit qu’avec répugnance, mais il se console à la pensée du supplice prochain qu’il réserve à son ennemi. Cependant Esther, à la prière de son oncle, se décide, pour sauver les juifs, à pénétrer chez le roi, malgré la défense qui interdit de s’en approcher. Elle sollicite la faveur de recevoir Assuérus à sa table. Aman assistera au festin. C’est en présence du persécuteur des juifs qu’elle se jette aux pieds du roi, lui avoue qu’elle est juive et dévoile les projets sanguinaires que son ministre a formés par un motif de vengeance personnelle. Assuérus, touché des larmes de la reine et convaincu de la perfidie de son favori, révoque l’édit de proscription et livre Aman au supplice préparé pour Mardochée.
Cette tragédie n’est pas sans défauts ; le plus grand de tous est le manque d’intérêt. Esther et Mardochée ne sont pas en danger malgré la proscription des juifs, car on est assuré d’avance que le roi qui aime son épouse ne la fera pas mourir parce qu’elle est juive, pas plus que Mardochée qui lui a sauvé la vie et qu’il vient de combler d’honneurs. Il ne s’agit donc que du peuple hébreu ; mais on sait que le danger d’un peuple ne peut pas faire la base d’un intérêt dramatique. Les caractères ne sont pas moins répréhensibles, à l’exception de celui d’Esther. Zarès, femme d’Aman, est complètement inutile. Mardochée n’est guère plus nécessaire. Assuérus est un fantôme de roi, un despote insensé qui proscrit tout un peuple sans le plus léger examen. La haine d’Aman a des motifs trop mesquins et l’on ne peut concevoir que le ministre d’un grand empire soit malheureux parce qu’un homme obscur refuse de se prosterner devant lui. Si cette tragédie est défectueuse comme ouvrage dramatique, elle a néanmoins des mérites remarquables. Le style d’Esther est enchanteur. Racine a transporté dans notre langue les beautés de la Bible et les plus sublimes inspirations des prophètes.
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